Projet Grand Requin Blanc de Méditerranée
Ce projet plonge ses racines dans une expérience de terrain, celle de François Sarano, fondateur de Longitude 181, qui côtoie les requins blancs depuis 13 ans, de l’Afrique du Sud au Pacifique oriental. Il se nourrit de ses 40 années d’observations du monde sous-marin.
Un documentaire
Le projet s’appuie sur une première étude réalisée pour le documentaire « Méditerranée, royaume perdu des requins » (France 2, oct 2013) au cours de laquelle les 2 réalisateurs, François Sarano et Stéphane Granzotto, ont parcouru la Méditerranée à la recherche des requins, en particulier des Grands blancs. Cette étude et les témoignages recueillis servent de base au programme actuel.
Un rêve : la magie d’une rencontre
Ainsi est née l’idée d’un programme consacré aux derniers Seigneurs de cette Méditerranée, avec à la fois l’envie de rencontrer le grand requin blanc, chez lui, sous l’eau, et d’assurer un avenir à long terme à la population méditerranéenne qui est aujourd’hui menacée d’extinction.
Le grand requin blanc était très abondant au début du XIXème siècle. Aujourd’hui, il est devenu rare en Méditerranée : sa population est classée « en danger d’extinction » par l’IUCN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature).
Le constat
Hormis quelques observations et captures, on ignore encore tout de la vie des grands requins en Méditerranée… Comment, dans ces conditions, prendre des mesures pertinentes pour assurer leur préservation ?
Des réponses de terrain pour une meilleure protection
Afin de répondre à ces interrogations, Longitude 181 lance le premier projet d’étude consacré aux grands requins blanc de Méditerranée. Ce programme, basé sur une expédition en mer, a pour ambition d’apporter des informations scientifiques concrètes pour améliorer les connaissances actuelles sur la biologie et les déplacements saisonniers des requins blancs et des grands requins. Il a pour objectif final leur préservation et le rétablissement des populations par la création d’une zone protégée sur leur site de reproduction.
Une première en Méditerranée
L’expéditions a pour objectif de rencontrer les grands requins en plongée libre, dans leur monde méditerranéen, et de rapporter les premières images sous-marines du requin blanc de Méditerranée. Ces images permettront au plus grand nombre de partager l’émotion de la rencontre avec ce seigneur des mers.
Comment ?
Des repérages et une expédition en mer pour réaliser les premières observations du requin blanc, sous l’eau, dans son milieu, en Méditerranée.
Un programme scientifique basé sur des observations en plongée, la pose de balises satellites, le prélèvement de biopsies pour analyse génétique, et des expériences sur la stimulation sonore des requins.
Un dialogue avec les pêcheurs qui sont susceptibles de les capturer pour les impliquer dans cette étude et obtenir leur adhésion aux futures mesures de protection.
Des mesures de protection pour éviter les captures accidentelles pendant les périodes critiques de la vie des requins (en particulier pendant la mise-bas), seule solution à même d’assurer un avenir durable à ces espèces.
Communiquer et rapporter les premiers témoignages en images (photos, vidéos) sur le requin blanc de Méditerranée, et sur les autres espèces qu’il côtoie dans son écosystème, pour les diffuser au plus grand nombre : web et réseaux sociaux, films et expositions.
Sensibiliser le grand public, convaincre les décideurs par des conférences, ouvrages, film, et à travers les médias. Rencontrer les autorités compétentes, grâce aux partenaires impliqués.
Les objectifs
D’année en année, l’analyse des informations collectées permettra d’affiner le programme afin d’obtenir de meilleurs résultats.
La première année sera donc une année de mise en route, de missions exploratoires en mer, et de premières prises de contact avec les pêcheurs.
Les résultats à long terme
Au niveau des requins :
- Confirmation de la zone de mise-bas du requin blanc.
- Proposition « d’espace-temps » protégés pour préserver les espèces dans leurs déplacements.
- Proposition « d’espace-temps » protégés correspondant aux zones de reproduction.
- Définition des éléments-clés de l’écosystème qu’il faut préserver pour protéger le grand blanc et les autres grands requins.
Au niveau des acteurs locaux :
- Sensibilisation des pêcheurs à la protection des grands requins pour qu’ils relâchent les prises accidentelles, en accord avec les recommandations des conventions internationales.
- Création de l’Association des Pêcheurs Protecteurs de Requins.
Où aura lieu le programme ?
Le long des côtes algériennes.
Le Grand requin blanc a été observé sur toutes les côtes de la Méditerranée occidentale, et même sur les côtes françaises !
Mais le recoupement des informations recueillies avec les possibilités socio-politiques actuelles nous permet d’espérer des rencontres le long des côtes algériennes, où les chances semblent plus importantes.
L’éthique du programme
Pas de capture de requin
Longitude 181 sera extrêmement attentive à l’éthique de l’opération.
En aucun cas, les requins ne seront pêchés ou manipulés.
Les expériences seront réalisées selon les principes d’une approche respectueuse des animaux. Les observations, la pose des balises satellites, le marquage et les prélèvements seront faits en plongée et de manière à perturber le moins possible les individus.
Pas de balise vissée dans l’aileron dorsal
Nous refusons d’utiliser des balises satellites qui fonctionnent en continu. Cette méthode est, a priori, plus attrayante car elle permet le suivi en temps réel des requins. Elle utilise le fait que le requin blanc vient régulièrement nager sous la surface, si près de la surface que le sommet de son aileron dorsal émerge. Chaque fois que cette dorsale sort de l’eau, la balise qui est fixée dessus peut émettre vers le satellite qui retransmet immédiatement la position de l’animal.
Balise requin blanc
Mais la pose de cette balise fait appel à des méthodes que Longitude 181 et tous ses partenaires réprouvent totalement. En effet, il faut capturer le requin avec un hameçon et le conserver sur le bateau pendant 10 à 20 minutes, le temps de forer des trous dans la dorsale pour y boulonner la balise…
Puis, il faut le déshameçonner, ce qui laisse souvent de graves blessures.
Exemple (en anglais) de l’impact de telles méthodes sur le requin blanc, au large de la Californie. En savoir plus
Des balises pop-up posées en plongée
Nous utiliserons donc des balises de type « pop-up tag » qui sont posées en plongée, sans capture de l’animal. Elles sont fixées par un simple ardillon que l’on pique sous la peau. Elles enregistrent les données pendant le temps souhaité et se détachent automatiquement à la date fixée.
Comment le reconnaître ?
Taille moyenne = 5 à 6 m, maximum = 6,5 m
Allure plutôt massive, museau conique.
Robe caractéristique, contrairement à la plupart des requins qui ont des couleurs assez uniformes. Le dos est gris et le ventre blanc, avec une ligne de démarcation bien nette. Le requin de Méditerranée est gris brunâtre, parfois noirâtre, alors que celui du Pacifique est gris clair.
Caudale falciforme (en forme de faux), dont les 2 lobes sont presque égaux.
Carène sur le pédoncule caudal : la partie terminale du corps est très aplatie horizontalement.
Nageoire dorsale haute, au sommet légèrement arrondi, et dont la bordure arrière est presque verticale.
Dents triangulaires à bords dentelés.
En quoi est-il intéressant ?
Super prédateur, situé au sommet des chaînes alimentaires, il ne peut survivre en grand nombre que si l’écosystème n’est pas amputé par des pêches excessives.
Le grand requin blanc est fragile
Il survit là où ses proies (grands poissons et cétacés) sont nombreuses, là où elles trouvent leur nourriture en quantité, là où cohabitent prédateurs et proies de toutes les tailles qui, ensemble, constituent un écosystème préservé.
L’existence de ce super prédateur dépend donc de l’intégrité de tout un écosystème. Il est le plus fragile, le premier à disparaître en cas de déséquilibre…
Pour préserver le grand requin blanc il faut donc préserver l’ensemble de l’écosystème dont il dépend.
Le grand requin blanc est l’espèce « rempart » de l’écosystème méditerranéen.
Est-il protégé ?
Le requin blanc bénéficie de la protection de 4 grandes conventions internationales.
Au niveau mondial :
La Convention des espèces migratrices (ou Convention de Bonn) depuis 2002.
L’objectif de cette convention est de fournir un cadre pour améliorer la coordination des états hôtes et leur permettre d’adopter des mesures protectrices puis de les appliquer.
La Convention sur le Commerce international des espèces menacées (ou CITES), depuis 2004.
Au niveau de la Méditerranée :
La Convention de Barcelone, où il est répertorié sous la catégorie « Espèces en danger »
La Convention de Bern, où il figure dans les « Espèces strictement protégées ».
Certains pays ont, en plus, pris des mesures spécifiques pour renforcer sa protection :
Malte, grâce à une législation spécifique adoptée en 1999 dans le cadre de la Loi n°5 sur la protection de l’environnement.
La Croatie, qui l’a déclaré « espèce strictement protégée ».
Malgré toutes ces mesures, le grand requin blanc de Méditerranée est insuffisamment protégé.
Où vit-il ?
Le requin blanc semble se déplacer dans toute la Méditerranée. On signale des observations ou des captures sur toutes les côtes du bassin occidental, beaucoup moins dans le bassin oriental.
Récapitulatif des 248 observations/captures de requins blancs sur 2 siècles, recensées par le Programme MEDLEM.
Pourquoi un super-prédateur ?
Le requin blanc adulte n’a pas beaucoup de concurrents, hormis les orques (photo ci-dessus).
Le plus grand poisson prédateur de Méditerranée.
Avec ses 6 m de long, le requin blanc est le 2ème plus grand requin de Méditerranée. Seul le requin pèlerin, qui peut atteindre 12 m, le dépasse en longueur. Cependant, le requin pèlerin n’est pas un chasseur : il se nourrit de plancton et petits poissons qu’il récupère en filtrant l’eau de mer, un peu comme les baleines.
Les autres grands prédateurs de Méditerranée sont des cétacés et non des poissons. Il s’agit de l’orque épaulard (8 m max), qui chasse les mêmes proies que le grand requin blanc, du globicéphale (6 m max) et du cachalot (18 m max) qui, tous deux, se nourrissent essentiellement de calmars.
Super prédateur
On parle de « super prédateur » parce que son régime alimentaire, très varié, est uniquement constitué de grands prédateurs : thons rouges, espadons ou grands poissons, dauphins, autres requins, raies, et parfois calmars ou tortues.
Avant de devenir un super prédateur, le jeune requin blanc, de moins de 2 m, ne chasse que des petits poissons (de la taille des sardines). Il est parfois lui-même la proie de gros prédateurs !
Pas de prédateur, hormis l’homme
Le requin blanc adulte n’a pas beaucoup de concurrents, hormis l’orque, les autres espèces s’attaquant en général à des proies plus petites. Il n’a pas non plus de prédateurs. Il ne redoutait donc personne jusqu’à ce que la pêche le décime, comme toutes les autres espèces de requins.
Que sait-on sur lui ?
La bibliographie montre que l’on sait fort peu de choses, hormis que :
- Le grand requin blanc était l’une des espèces de requins les plus abondantes en Méditerranée au début du XIXème siècle, d’après la synthèse du naturaliste Marcel de Serre (1848).
- La dégradation de son environnement, la surexploitation de ses proies, la disparition du phoque moine, et surtout les captures volontaires et involontaires dans des engins de pêche destinés à d’autres poissons, ont amené la population méditerranéenne au bord de l’extinction.
- Régulièrement, les pêcheurs capturent des femelles pleines au large de la Tunisie – laissant supposer que cette zone est favorable à la mise-bas des grands requins blancs
Quelles menaces pèsent sur lui ?
La vraie menace qui pèse sur les requins blancs de Méditerranée est la pêche, sans commune mesure avec les orques épaulards (photo ci-dessus) qui sont ses seuls prédateurs naturels.
Une espèce en danger d’extinction
Le grand requin blanc figure sur la Liste Rouge des espèces menacées de l’IUCN*. A l’échelle de la planète, cette espèce est considérée comme « vulnérable », ce qui est déjà préoccupant.
Au niveau de la Méditerranée, son statut est encore plus critique puisqu’elle est classée « en danger d’extinction ».
*IUCN = Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
Cet organisme propose une évaluation de la situation des espèces de la planète (marines et terrestres) appelée « Liste Rouge des espèces menacées ». Elle se base sur toutes les données scientifiques disponibles. Sa liste est régulièrement réactualisée.
Bateau senneur en pêche au thon rouge
Les principales menaces
La pêche est la principale cause du déclin des requins blancs. Aucune technique de pêche n’est spécifiquement dirigée vers le requin blanc, mais tous les principaux engins de pêche capturent ces requins de façon accidentelle, c’est-à-dire à la place des espèces recherchées. Le fort développement de la pêche, depuis les années 1970, a entraîné la multiplication de ces captures annexes, au point de mettre la population en péril.
Les principaux engins sont : le chalut, la palangre (immense ligne de pêche munie de milliers d’hameçons appâtés), la senne coulissante (filet avec lequel on encercle tout un banc de thons) et le filet dérivant (filet vertical, semblable à un filet de tennis, qui flotte en surface sur des kilomètres de long). Les requins blancs se piègent aussi dans les cages flottantes où l’on engraisse les thons rouges.
Enfin, s’ajoute le déclin de ses proies habituelles qui sont surexploitées : les thons rouges et les espadons.
45 espèces de requins vivent en Méditerranée !
- Ils ont toutes les tailles, du requin pèlerin de plus de 10 m à l’émissole d’1 m.
- Ils ont toutes les formes, puissante et élancée comme le requin blanc, avec une immense queue comme le requin renard, une tête en T comme le requin marteau ou un corps aplati comme l’ange de mer.
- Ils ont conquis tous les espaces : certains vivent en surface, d’autres à grande profondeur ; les uns restent près des côtes et les autres préfèrent le large.
- Ils ont tous les modes de reproduction : ovipare, vivipares, ovovivipares.
Tous sont fragiles car vulnérables à une pêche excessive
Ils grandissent lentement, ils ne se reproduisent pas avant l’âge de 5 à 10 ans, ils ont peu de petits par portée. Tous ces éléments font qu’ils ne peuvent pas renouveler rapidement les ponctions faites par la pêche. Résultat : Toutes les populations de requins ont été décimées, certaines à plus de 97 % comme le requin mako, requin marteau, requin bleu et requin renard.
21 espèces sont en danger d’extinction en Méditerranée…
La dernière évaluation de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) indique que 21 espèces sont menacées. Dans les détails :
- 7 espèces sont considérées « en danger critique d’extinction »
- 4 espèces sont considérées « en danger d’extinction »
- 4 espèces sont considérées « vulnérable »
Pour la plupart des autres requins, on dispose de trop peu de données scientifiques. Mais lorsque l’on aura rassemblé suffisamment d’information, il est fort probable qu’elles seront elles aussi classées « en danger ».
Comment reconnaître ces espèces menacées ?
Pour identifier facilement les requins, Longitude 181 a créé des fiches détaillées, à destination de tous. Basées sur des dessins annotés, elles permettent de reconnaître rapidement ces requins, que ce soit en mer ou sur les étals des poissonniers où ils ne devraient pas être…
Les fiches en version plastifiées sont en vente dans la boutique en ligne de Longitude 181 (jeu de 10 fiches en format A5)
Découvrez ci-dessous la collection :
Les requins de Méditerranée à protéger